Infirmieres Covid 19
Séance photo réalisée après le premier confinement, en donnant la parole à des infirmières libérale de Marseille sur leurs vécus, leurs ressentis, leurs doutes, et travaillant dans differents arrondissements de la ville.

Le matin, lorsque je pars au travail, c'est avec un moral de guerrière. On doit s'adapter au fil des jours, faire avec ce que l'on a.

Les patients et les familles, me jugent à ma tenue. Si j'arrive en civil, c'est que tout va bien, sinon c'est que j'ai des cas de Covid parmi mes patients. Alors que c'est juste pour les protéger.

Ma plus jeune fille a une santé très fragile. Lorsque je rentre du travail, elle n'a qu'une envie, c'est de venir dans mes bras, mais je suis obligée de la garder à distance tant que je ne me suis pas lavée de peur qu'elle tombe malade. J'ai l'impression que ce mal est avec moi et attend l'opportunité pour la contaminer

Beaucoup de personnes nous admirent et nous considerent comme des héros, mais est ce que vous en avez déjà vu un avec des sacs poubelles comme tenue ? Drôle de reconnaissance et de soutien de la part de nôtre gouvernement.

L'espoir d'avoir du matériel et de l'aide venant de l'état est à la hauteur de nous voir soigner les patients dans cette tenue.

Je devais partir le matin à mon travail beaucoup plus tôt, en cachette avec une veste à capuche sur ma blouse, de peur que dans mon quartier, ils puissent voir ma profession et que ça se passe mal par la suite, comme ça a pu arriver à certains de mes confrères.

L'avenir ? Ce n'est pas facile de s'y projeter. Combien de temps ça va durer ? Cela va t il changer définitivement nôtre manière de vivre ? Tout cela est inquiétant car nous allons vite arriver en été. Si il y a une nouvelle contamination, comment sera t elle gérée. Tout le personnel soignant est épuisé.

D'une semaine à l'autre, tout a changé. J'avais peur mais sans trop réaliser jusqu'à ce que je discute avec du personnel hospithalier en réanimation. A partir de là, j'ai réellement eu peur, autant pour mes patients que ma famille. Tu es obligée de créer une distance physique avec les patients. Certains l'ont compris très bien, d'autres, pas du tout. Des membres de familles essayent à savoir si on a des patients Covid car si c'est le cas, ils ne veulent plus que tu t'occupes de leurs parents, ça te donne l'impression de ne servir à rien car tu fais extremement attention et on te demande de te justifier sur ta maniere de travailler, alors qu'avant cela les mesures d'hygienes étaient déjà presentes. On a rajouté le masque, la charlotte, et la blouse pour proteger les patients et non pas parce que l'on a obligatoirement des patients Covid.

Ce qui me fait le plus peur c'est l'après. Pour le moment il y a cette espèce de distance. Tu ne fais pas la bise, etc.... Mais une fois que le confinement sera terminé car il ne sera pas éternel, comment tu vas vivre ??? Tu vas refaire la bise à tout le monde comme si rien ne c'était passé ?? Serrer la main aux gens ?? Je ne sais pas...

La deuxième vague ? On devrait retenir la leçon de la premiere. On saura comment gérer le matériel, les besoins humain. Si il y a une autre épidémie, la vie ne devra plus s'arrêter , la population devra continuer à se laver les mains, garder cette habitude et faire attention.

Pour moi, c'est l'humanité des gens qui est ressortie, leur gentillesse, leurs gestes. Dans le libérale, les personnes nous ont beaucoup aidés. Chez certains que je connais, j'ai pu voir leur âme. Y a quelque chose au fond d'eux que je ne voyais pas avant. Des patients m'ont ménagé, ils étaient bienveillants pour que je puisse encore mieux m'occuper d'eux.

Au début c'était très violent, pas d'informations, nous étions isolés. Beaucoup cherchaient du matériel. Au niveau des patients, certains avaient peur de nous, mais on avait peur aussi. Des familles ne comprenaient pas pourquoi on métait le masque, et elles ne voulaient pas nous laisser rentrer.
Kirsty
Une petite mise en scène avec la modèle Kirsty dans une cuisine montrant ses talents à la dégustation puis à faire la vaisselle.




